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La langue française est-elle sexiste ?

Depuis quelques années, les débats sur la langue française s’intensifient. Il y a ceux qui disent qu’elle est sexiste et ceux qui ne comprennent pas comment on peut penser une chose pareille. Pour s’en rendre compte, il suffit de lire les commentaires sous les vidéos ou les articles qui traitent ce sujet. En effet, il suscite de vives réactions. Il n’y a pas de zone grise, mais seulement deux camps aux idées farouchement opposées. Alors, la langue française est-elle sexiste ?

Ce qui peut être considéré sexiste dans la langue française

La règle du masculin l'emporte sur le féminin

La France fait partie des pays dont la distinction entre le féminin et le masculin est la plus forte. Cependant, cela signifie-t-il pour autant que le français est une langue sexiste ?

Le reproche qui est le plus souvent attribué à la langue française est la fameuse règle du « masculin l’emporte sur le féminin ». Cette dernière est assez récente, puisqu’elle est seulement apparue au XVIIème siècle. Néanmoins, à l’époque, elle portait un nom différent.

En effet, Dominique Bouhours, un grammairien français, propose alors de changer l’accord de proximité. D’après lui, « lorsque deux genres se rencontrent, il faut que le plus noble l’emporte ». S’il restait un doute quant au genre qui dominerait l’autre, Nicolas Bauzée, membre de l’Académie française, l’a effacé. Ce dernier a indiqué que « le masculin est réputé plus noble que le féminin à cause de la supériorité du mâle sur la femme ».

Le masculin comme genre neutre

Malgré la volonté évidente de marquer la supériorité de l’homme sur la femme, les défenseurs de cette règle prônent le masculin comme genre neutre. L’ancien premier ministre Édouard Philippe appuyait également cette version. Son gouvernement avait en effet reçu pour note que « le masculin est une forme neutre qu’il convient d’utiliser pour les termes susceptibles de s’appliquer aux femmes ». Cette thèse est appuyée par l’Académie française, qui ajoute que le masculin est « l’héritier du neutre latin ».

Effectivement, le latin avait un genre neutre, mais qui a disparu de toutes les langues dont il est issu excepté le roumain. D’après le Haut Conseil à l’Égalité entre les femmes et les hommes, la langue française est une langue à deux genres, le masculin et le féminin. Il définit le masculin comme un genre non neutre, mais par défaut.

À contrario, le philosophe Alain Champseix pense que ce débat n’a pas lieu d’être. D’après lui « le féminin et le masculin dans la langue ne sont pas le féminin et le masculin en dehors de la langue ».

La féminisation des noms

Au-delà de cette règle d’accord, il existe un autre débat lié au genre de la langue française qui concerne la féminisation des noms. L’exemple le plus connu est celui des métiers, dont un nombre conséquent n’ont pas d’équivalent féminin. Cela est surtout valable lorsqu’il s’agit de postes à responsabilités. Doit-on dire la ministre ou le ministre lorsqu’une femme est au gouvernement ? Est-ce qu’une femme qui écrit est un auteur, une auteure ou une autrice ?  Si une femme gagne un tournoi, est-elle vainqueur ou vainqueure ?

Les dissymétries sémantiques

De plus, le vocabulaire français diffuse un grand nombre de préjugés sexistes avec ce qu’on appelle les dissymétries sémantiques. Il s’agit de « l’inégalité de sens entre un mot masculin et son féminin. […] Le mot féminin comporte une nuance péjorative, négative ou carrément dégradante alors que le masculin se veut neutre ou noble ». Par exemple, un « gars » est un garçon, tandis qu’une « garce » est une prostituée ou une femme vulgaire.

Alors, la langue française est-elle sexiste ?

Eh bien, la question ne semble pas être tranchée. Tout dépend du camp dans lequel on se trouve. Pour ma part, je répondrais que oui.

Il convient de conclure que le sexisme de la langue française n’est pas vraiment une question d’écriture, mais plutôt une volonté politique et idéologique. L’Académie française, qui n’a accueilli que huit femmes depuis sa création, ne peut pas vraiment être considérée comme une institution neutre.

Avouer que le français est sexiste ouvrirait la voie à des changements pour lesquels aucun corps étatique n’est prêt. De la peur, de la lâcheté ou simplement de la flemme ? 

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